Esthétique, connaissance, invention

PAS ASSURE CETTE ANNEE 2024/25

« Figures de Caïn aux 20^e et 21^e siècles : la violence fratricide en question »

Il s’agira d’étudier ici le devenir d’une grande figure biblique, pour voir la façon dont les écrivains de la Modernité en renouvellent l’approche. On connaît bien la figure du Caïn romantique, que Byron et Hugo, pour ne nommer qu’eux, ont rendu célèbre. Un Caïn révolté, un Caïn racheté parfois, au point même que, de son frère Abel ou de lui, on ne sait plus clairement qui est l’ange, et qui la bête. Mais Caïn devient ensuite, à partir des années 1910, une figure de la modernité, comme l’a fort bien montré Véronique Léonard-Roques. On reviendra rapidement sur l’histoire de ce mythe littéraire, pour s’intéresser à ces cent dernières années traditionnellement envisagées comme l’époque de « la mort de Dieu ».

Les récits bibliques qui mettent en scène de tels héros ne se conçoivent, à l’origine, qu’en fonction de ce Dieu dont on transgresse la Loi, et que l’on défie : que devient ce mythe, comment fonctionne-il, qu’a-t-il à nous dire, lorsque la trame en est reprise dans un univers sans transcendance ? L’étude de cette figure nous conduira à explorer les arcanes de cette redistribution des rôles à laquelle conduit un « monde sans Dieu », et qui mène souvent à approfondir le sens de ces mythes d’origine biblique. C’est sous cet angle qu’on analysera quelques œuvres (des Caïns « modernes ») choisies en commun lors du premier séminaire, et souvent proposées sous forme d’extraits distribués en cours. Des œuvres picturales ou musicales (le rap, en particulier, a proposé d’intéressantes relectures de Caïn), mais aussi des films, des séries, ou des bandes dessinées pourront être étudiées : les mythes naissent et vivent dans une constante interaction entre diverses formes d’art.

On verra ainsi, au cours de ce séminaire, la postérité de la figure ambivalente de l’errant et du révolté (un Caïn proche du Prométhée antique, mais aussi de Nemrod, ou encore de Job, et qui clame sa souffrance), celle du Caïn fratricide, qui conduit à examiner les fondements et le fonctionnement de la violence entre peuples (dimension politique du mythe, repris en particulier, comme on le verra, dans le cadre des littératures postcoloniales), mais aussi celle d’un Caïn en figure de l’artiste (Caïn, père de Tubal Caïn). On examinera la façon dont la psychanalyse, en particulier, a renouvelé le sens de cette figure mythique à laquelle s’attachent, tout au long du 20^e siècle, de nouveaux enjeux, tant sur le plan éthique que politique ou ontologique. Ce héros traditionnellement associé à la violence fratricide devient dès lors le lieu d’une réflexion d’ordre anthropologique.

Apprendre à travailler sur de grands mythes qui témoignent de l’interaction constante entre la littérature et les arts.

Comprendre les enjeux éthiques, politiques et philosophiques de ce type de travail dans le cadre de la recherche en littérature française, francophone et comparée.

Étudier des œuvres de littératures française et étrangères, mais aussi des œuvres artistiques très variées : films, peintures, œuvres musicales (opéra, chanson, rap), bandes dessinées…

Apprendre à connaître cette œuvre littéraire qu’est la Bible.

• Session 1: Mini-dossier ou oral (à l'appréciation de l'enseignant)

• Session 2 dite de rattrapage : 1 mini-dossier

Très bonne maîtrise de la langue française

Maîtriser les problématiques associées à la recherche en littérature comparée.

Quelques articles et ouvrages sur la figure de Caïn :

Hussherr, Cécile, « Caïn »,  in Parizet, Sylvie (dir.), La Bible dans les littératures du monde, Ed. du Cerf, 2016.

Hussherr, Cécile, L'Ange et la bête, Caïn et Abel dans la littérature, Paris, Cerf, 2005.

Léonard-Roques, Véronique, Caïn, figure de la modernité, Paris, Champion, 2003.

Sellier, Philippe, « Caïn », in Brunel, Pierre (dir.), Dictionnaire des mythes littéraires, Ed. du Rocher, 1988.

Corpus défini à la rentrée, et affiné en fonction des centres d’intérêt des étudiants qui suivent le séminaire.